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Guerre contre l'Ukraine

Comment Mohammed ben Salmane profite de la guerre en Ukraine

Mohammed ben Salmane et Volodymyr Zelensky, le 19 mai 2023.
Mohammed ben Salmane et Volodymyr Zelensky, le 19 mai 2023.Keystone

Comment les Saoudiens tirent profit de la guerre en Ukraine

Il y a quelques années encore, le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane, était considéré comme un paria. Il s'impose désormais en médiateur dans la guerre en Ukraine.
04.08.2023, 16:5604.08.2023, 17:12
Thomas Seibert, Istanbul / ch media
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Mohammed ben Salmane entretient de bonnes relations avec Vladimir Poutine. Récemment encore, le prince héritier saoudien a fait l'éloge de l'étroite collaboration entre les deux pays dans le contrôle des prix mondiaux du pétrole lors d'une conversation téléphonique avec le chef du Kremlin.

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Les choses semblent avoir changé. Mohammed ben Salmane, MBS pour les intimes, a organisé une conférence sur la guerre en Ukraine avec des politiques de près de 30 pays, sans inviter la Russie. Derrière cette décision se cachent des intérêts personnels.

Tous à Djeddah

La conférence qui se tiendra ce week-end dans la ville portuaire saoudienne de Djeddah, au bord de la mer Rouge, fait suite à une réunion similaire qui s'est tenue à Copenhague en juin. Jake Sullivan, conseiller américain à la sécurité, y est notamment attendu, tout comme le conseiller à la sécurité du chancelier allemand Olaf Scholz, Jens Plötner.

Lors de la réunion, le gouvernement de Kiev veut parler de son plan de paix, qui prévoit le retrait des troupes russes de l'est de l'Ukraine et de la Crimée. Selon les informations du journal britannique Guardian, l'Occident souhaitait obtenir lors de la conférence que de grands pays comme l'Inde et le Brésil passent dans le camp antirusse. La Chine serait également courtisée, mais on ne sait pas encore si Pékin enverra un représentant du gouvernement à Djeddah.

Une tribune pour MBS

Comme de nombreux autres pays participant à la conférence, l'Arabie saoudite évite, jusqu'à présent, de prendre parti dans la guerre en Ukraine. La monarchie pétrolière soutient certes Kiev avec une aide humanitaire d'une valeur de 400 millions de dollars, mais n'a pas adopté les sanctions occidentales contre Moscou et coopère avec Poutine au sein du groupe Opep-Plus, un regroupement des plus grands producteurs de pétrole du monde.

L'objectif de Mohammed ben Salmane à Djeddah n'est pas tant de progresser dans ses efforts pour mettre fin à la guerre, mais de se poser en médiateur.

Avec cette conférence, l'Arabie saoudite veut se présenter comme un «intermédiaire honnête», explique Sebastian Sons, expert pour la région du Golfe auprès du groupe de réflexion Carpo à Bonn. Avec cette rencontre, les dirigeants de Riyad veulent souligner leur engagement en faveur de la désescalade et montrer leur présence sur un sujet important au niveau international, déclare Sebastian Sons à ce journal.

MBS l'avait déjà démontré en mai en invitant le président ukrainien Volodymyr Zelensky au sommet de la Ligue arabe à Djeddah. A l'époque déjà, le prince s'était proposé comme médiateur entre l'Ukraine et la Russie.

Sebastian Sons estime qu'il est particulièrement important pour l'héritier du trône d'envoyer un signal aux Etats-Unis lors de la conférence sur l'Ukraine de ce week-end:

«Regardez, nous sommes en mesure d'agir avec assurance et en tant que médiateur dans cette crise»

Renforcer sa réputation

Pour le conseiller américain à la sécurité Jake Sullivan, la conférence sur l'Ukraine est la deuxième visite en Arabie saoudite en quelques jours. Il s'était déjà entretenu avec MBS à Djeddah la semaine dernière.

Des visites occidentales de haut niveau comme celle-ci renforcent la réputation internationale du prince héritier saoudien, qui avait été mis au ban des Etats-Unis et de l'Europe après l'assassinat de l'opposant au régime Jamal Khashoggi en octobre 2018. Aujourd'hui, MBS veut être pris au sérieux en tant que gestionnaire de crise internationale. La conférence de Djeddah lui offre une tribune.

Pour cela, MBS accepte que le gouvernement de Poutine réagisse de manière négative à la rencontre prévue. La Russie veut savoir ce qui sera discuté à Djeddah, a déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. Mohammed ben Salmane ne s'attend toutefois pas à de plus gros ennuis avec la Russie, qui ne peut pas se permettre de perdre encore plus de partenaires internationaux.

Erdogan joue également avec Poutine

D'autres hommes politiques exploitent également cette faiblesse de Poutine en matière de politique étrangère. Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui, comme MBS, travaille en étroite collaboration avec Poutine, a récemment froissé le gouvernement russe en libérant des officiers ukrainiens qui avaient été faits prisonniers par la Russie et étaient venus en Turquie dans le cadre d'un échange de prisonniers.

En outre, Erdogan a signalé qu'il souhaitait abandonner son opposition à l'adhésion de la Suède à l'OTAN. Comme MBS, Erdogan voit une occasion d'apaiser ses partenaires occidentaux en prenant quelque peu ses distances avec la Russie.

Selon Sebastian Sons, le fait que l'Arabie saoudite accueille la conférence sur l'Ukraine sans la Russie ne signifie pas que Riyad prend désormais clairement parti pour l'Occident dans le conflit. Riyad ne veut pas gâcher sa coopération avec la Russie au sein de l'Opep-Plus et considère que la guerre est avant tout un problème pour l'Occident.

Traduit et adapté par Noëline Flippe

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source: sda / stringer
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